Octobre 2014- novembre 2015

Sénégal
Les grandes affaires polito-judiciaires de la décennie

Avant Khalifa Sall, bien d’autres responsables politiques ont séjourné derrière les barreaux.


Twitter
2005

Idrissa Seck



Poursuivi dans le cadre de l’affaire dite des chantiers de Thiès, Idrissa Seck est convoqué en juillet 2005 par la Division des investigations criminelle (DIC), une section de la police sénégalaise. Suite à la perquisition de son domicile, où les enquêteurs ont trouvé des ordinateurs et une somme de 1,7 million d’euros en liquide, l’ancien premier ministre d’Abdoulaye Wade (2002-2004), qui s’imagine déjà en dauphin lors de la présidentielle de 2007, est inculpé d’« atteinte à la sûreté de l’Etat ». Une accusation fantaisiste, censée justifier son placement en détention provisoire à la prison de Rebeuss au terme d’une semaine de garde à vue. L’Assemblée nationale (acquise à Abdoulaye Wade) votera sa mise en accusation pour malversation, permettant ainsi sa comparution devant la Haute Cour de Justice, Exclu du PDS, où il milite depuis l’adolescence, Idrissa Seck est formellement inculpé de « détournement de fonds publics » en août 2005. Après sept mois d’emprisonnement et deux non-lieux, Idrissa Seck, blanchi, est libéré le 7 février 2006.

LIRE AUSSI : Idrissa Seck : "Mon seul problème, c'est Abdoulaye Wade"

Twitter
2008

Malick Noël Seck



L’activisme de Malick Noël Seck aura coûté à cet ancien cadre des Jeunesses socialistes pas moins de trois passages en prison entre 2008 et 2012, durant la fin de règne d’Abdoulaye Wade. Inculpé d’« attroupements sur la voie publique » en septembre 2008 pour avoir distribué des tracts devant l’Assemblée nationale avec cinq autres de ses camarades, le jeune militant est incarcéré pour la première fois à la prison de Rebeuss où il reste un mois. Malick Noël Seck est à nouveau condamné en octobre 2011 à deux ans de prison ferme après avoir adressé une lettre au président du Conseil constitutionnel dans laquelle il tient des propos virulents envers Abdoulaye Wade, qui brigue un troisième mandat controversé. Pour avoir cité dans sa missive deux phrases de l’Argentin Jacinto-Luis Guerena – « Vivre coûte beaucoup, mourir également. Faire front exige de la dignité » –, il est inculpé pour « menaces de mort et outrage à magistrat » et incarcéré à Rebeuss. Il est ensuite transféré au camp pénal de Dakar puis à Tambacounda, dans le sud-est du pays. En janvier 2012, à un mois du premier tour de la présidentielle, Malick Noël Seck bénéficie d’une grâce présidentielle d’Abdoulaye Wade qu’il n’a pas sollicitée et est aussitôt libéré. Mais à peine sorti de prison, son chauffeur et deux militants socialistes sont arrêtés à Saint-Louis (Nord), où Seck fait campagne contre Wade, pour « possession d’arme illégale », après la découverte d’un gourdin dans son véhicule. Le jeune socialiste se constitue prisonnier pour les faire libérer. Il sera remis en liberté trois semaines plus tard.

LIRE AUSSI : Sénégal – Malick Noël Seck : « Je n’ai jamais réclamé la grâce présidentielle »

Twitter
2013

Karim Wade



Fils controversé de l’ex-président sénégalais, Karim Wade cumule la plus longue période derrière les barreaux. D’avril 2013 à juin 2016, l’ancien « ministre du Ciel et de la Terre » a séjourné à Rebeuss, où aura défilé au parloir, pour l’y rencontrer, le ban et l’arrière ban du Gotha sénégalais. Accusé de s’être constitué, par le biais de montages financiers complexes, un patrimoine illicite évalué à 178 millions d’euros, il est condamné en mars 2015 à six ans de prison ferme et 138 milliards de FCFA de dommages et intérêts par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei). Une peine confirmée en août 2015 par la Cour suprême, les statuts de la Crei ne prévoyant pas la possibilité pour les condamnés d’interjeter appel. Dans la nuit du 23 au 24 juin 2016, Karim Wade est gracié par Macky Sall et s’envole immédiatement pour Doha, au Qatar.

LIRE AUSSI : Sénégal : l’histoire secrète de la libération de Karim Wade

Twitter
2014

Samuel Sarr



Ex-ministre de l’Energie et ami de trente ans d’Abdoulaye Wade, il a été inculpé le 21 août 2014, notamment, d’actes et manoeuvres de nature à troubler la sécurité publique, injure et offense au chef de l’État et diffusion de fausses nouvelles. Samuel Sarr avait publié trois jours plus tôt un statut sur sa page Facebook dans lequel il se demandait pourquoi Me William Bourdon, le fondateur de l’association Sherpa – et l’un des avocats de l’Etat sénégalais dans l’affaire Karim Wade –, ne réclamait pas la saisie des « milliards de Macky Sall » soit-disant déposés dans des banques américaines – sans fournir d’élément probant à l’appui de cette affirmation. D’abord incarcéré à Rebeuss, il est rapidement transféré à la prison du Cap Manuel, à Dakar, où il séjournera pendant plus d’un mois avant d’obtenir une mise en liberté provisoire. Jusqu’ici, il n’a pas été jugé. « On attend la prescription des faits », commente son avocat, Me El Hadj Amadou Sall.

Twitter
2015

El Hadj Amadou Sall



L’ancien ministre de la Justice d’Abdoulaye Wade est incarcéré le 17 mars 2015 à la prison de Rebeuss avant d’être transféré, 24 heures plus tard, à celle du Cap Manuel, à Dakar. Ce membre éminent du comité directeur du PDS avait été inculpé d’« offense au chef de l’État et atteinte à la sûreté de l’État » pour avoir critiqué de façon virulente le président de la République. « Si jamais Macky Sall fait emprisonner Karim Wade, il ne passera pas une seule nuit de plus au palais », avait-il menacé à la veille de la condamnation de ce dernier. Après trois mois d’emprisonnement, Me Sall obtient sa mise en liberté provisoire. Condamné à trois mois avec sursis dans le cadre de cette affaire, il a déposé un recours devant la Cour de cassation, dont il attend la décision.

Twitter
2015

Oumar Sarr



Le numéro 2 du PDS a été inculpé pour « faux, usage de faux et diffusion de fausse nouvelle », le 21 décembre 2015, après la diffusion, trois jours plus tôt, d’un communiqué au vitriol contre Macky Sall surfant sur les révélations du journal Le Monde sur de possibles financements politiques d'opposants sénégalais par la fédération russe d'athlétisme. Le député et maire de Dagana (Nord), qui fut notamment ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat sous l’ère Wade, est arrêté et placé en détention provisoire à Rebeuss, alors même que l’Assemblée nationale n’avait pas levé son immunité parlementaire – la justice invoquant un cas de « flagrant délit ». Oumar Sarr obtient sa mise en liberté provisoire le 26 janvier 2016, après un mois d’emprisonnement. Poursuivi, comme Samuel Sarr, au titre du fameux article 80 du code pénal sénégalais, portant sur les troubles à la sécurité publique, il n’a pas encore été jugé.

Twitter
2017

Bamba Fall

Le maire socialiste de la Médina (une commune de Dakar), a été placé sous mandat de dépôt le 9 janvier, après cinq jours de garde à vue. Ce fidèle lieutenant de Khalifa Sall est poursuivi après les échauffourées du 5 mars 2016 qui ont éclaté lors d’une réunion du bureau politique qui devait décider de la position à tenir au sujet du référendum constitutionnel convoqué par Macky Sall. La justice a notamment retenu à son encontre la tentative d’assassinat, une incrimination passible de la réclusion à perpétuité. Incarcéré à la prison de Rebeuss, il a été écroué aux côtés de neuf autres proches de Khalifa Sall, dont son directeur de cabinet, Bira Kane Ndiaye.

Twitter
2017

Khalifa Sall



Le maire de Dakar a été placé sous mandat de dépôt après son audition par le doyen des juges d’instruction, le 7 mars, pour détournement de fonds publics, association de malfaiteur, faux et usages de faux. Il est accusé d’avoir fourni de faux justificatifs pour mobiliser les fonds de la « caisse d’avance » de la mairie de Dakar – une enveloppe mensuelle de 30 millions de Francs CFA (environ 50 000 euros) notamment destinée aux populations défavorisées. Un rapport d’audit de l’Inspection générale d’Etat (IGE), transmis à la justice par le président Macky Sall, met en cause la probité des factures présentées, entre 2011 et 2015, pour justifier a posteriori l’affectation de ces sommes – pour un montant total de 2,7 millions d’euros. Khalifa Sall est actuellement incarcéré à la prison de Rebeuss. Le maire de Dakar fait valoir que l’Etat n’avait jusqu’alors jamais demandé de « justificatifs » concernant la gestion de ce fonds d’urgence alloué à la mairie et s’estime victime d’un « complot politique ».

LIRE AUSSI Sénégal : quelles sont les conditions de détention de Khalifa Sall ?






CRÉDITS

Une timeline de Natacha Gorwitz

Code: Jean Abbiateci et Libédata
Iconographie: Natacha Gorwitz
Photos: SIPA/a>